Le bruit est bien souvent une particularité désagréable des grandes citées. Des multiples aéroports des méga(lo)pôles américaines aux coups de klaxons frénétiques des pousse-pousses indiens, le bruit est partout.
Mais quand en plus, il s'immisce dans le quotidien sous couvert de politesse, c'est le début de la fin.
Ma récente expérience avec le simple vitrage grenoblois a eu des conséquences beaucoup plus lourdes que prévues: je suis devenu intolérant vis à vis du bruit. C'est un fait, il faut l'accepter ou du moins, le faire rapidement comprendre à mon entourage. Et la chose se gâte quand ce même entourage n'y prête pas attention.
Compte tenu d'une redistribution des cartes, nous avons récemment changé de bureau avec mon collègue Willie. Premier bon point, nous sommes maintenant voisins, ce qui me permet de trouver assez rapidement une écoute attentive en cas de question. Deuxième bon point, nous sommes dans un petit coin isolé, bordé par deux bureaux vitrés de managers locaux et retiré de la cohue des couloirs passagers.
Enfin, ça c'est ce que je pensais au premier abord...
Très vite, il s'est avéré que mes nouveaux petits collègues* allaient mener la vie dure à mon oreille absolue et à moi même. Au début, je pensais que Jean-Luc Delarue avait emménagé dans l'un des bureaux vitrés. Autant de reniflements à la minute, cela ne pouvait être qu'un cocaïnomane aguerri. Pas du tout! Je l'ai appris récemment, le reniflement fait partie de la culture, voire de la politesse. Se moucher? Totalement déplacé dans l'espace public. Bon, dans le pire des cas cela me ramène à mes belles années de maternelle où ce genre de pratique pouvait se comprendre.
La maternelle, la maternelle... Le temps béni où l'on pouvait faire la sieste aussi!? Deuxième point commun! La faculté qu'ont les asiatiques à s'assoupir pour un rien est assez impressionnante. En avant première voici un aperçu de mon ennemi-professionnel numéro 1: Nick-Quasi-Sans-Tête, aka le chauffeur particulier de notre Corporate VP. Et oui à ST, les chauffeurs particuliers ont un bureau au même titre que les autres employés. Comme ça, il peut bien ronfler pendant la sieste et mes conférences téléphoniques, lire, relire, plier, redéplier, faire des avions avec son journal sur son grand bureau et appeler ses copines du troisième âge pour les afters-Mahjong de 17h30.
L'homme qui dormait plus vite qu'il ne conduit |
Au fond, c'est surement un brave petit monsieur**, mais je ne peux m'empêcher d'avoir des pulsions meurtrières quand il mastique bruyamment ses goûters en lisant le journal. Si vous voulez avoir une idée du bruit, essayer vous-même: mettez votre langue sur la partie extérieure des dents du haut et aspirez de l'air. Répétez l'opération plusieurs fois jusqu'au moment où votre entourage viendra prendre de vos nouvelles.
Dans le bureau de Jean-Luc-bis, je fais face à une autre coutûme asiatique: la place du male dominant. "J'ai eu un plus grand bureau que les autres, c'est donc que je suis le chef. De ce fait, il faut que je parle encore plus fort pour asseoir ma place dans l'entreprise." Mes deux collègues présents dans le bureau sus-nommé ont l'intime conviction qu'il est de leur devoir de me faire partager leurs conversations.
Mais il y a encore plus drôle! Le deuxième bureau est occupé par un jovial singapourien très avenant et rieur. Le deuxième jour suivant notre déménagement, je me suis surpris à entendre de légères tonalités proches de cris d'oiseaux au loin. Croyant mêler un genre de syndrome de Jeanne-d'Arc-aigu à une crise de Nicolas-Hulot latente, je n'ai pas donné plus de crédit à ce détail... Jusqu'au moment où, plongé dans mes réflexions professionnelles (mais à quoi sert cette codification?..), j'ai réalisé que ce n'était rien de tout cela et que mon ouïe fine me rappelait à mon intolérance. Après une rapide analyse de la situation, mon regard suspicieux s'est porté sur le bureau n°1. Et effectivement, il y avait là un disque laser qui tournait en boucle depuis une heure pendant que mon gentil-jovial-collègue profitait de son Tea-Break***. J'ai fait part de ma sensibilité pour la protection du monde animal mais aussi de mon besoin extrême de concentration pendant mes heures de travail et de la potentielle incompatibilité entre nos deux positions. Après avoir essayé de me convertir à la musique relaxante, censée être représentée par ces bruits stridents (la blague!), je lui ai proposé de lui faire une démonstration de mes qualités de lanceur de lecteur de disque laser Sony et nous sommes finalement tombés d'accord sur le fait que les portes pouvaient aussi remplir un rôle de modérateur dans cette situation.
Je continuerai ce billet sur les bruits locaux passionnants un autre soir car je dois profiter de l'accalmie choisie par de braves ouvriers indiens dans l'accomplissement d'une tranchée au marteau-piqueur dans la rue située au pied de mon immeuble à 01:19am.
Il faut l'entendre pour le croire!
*oui, étant assez grand, je peux les appeler affectivement mes "petits collègues" dans 99% des cas.
**elle se reconnaitra... ;-)
***autre particularité: n'essayez pas de joindre Singapour vers 04:00 CET, la vie s'arrête pour le Tea Break.
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